HISTORIQUE DE LA FORMATION OUVERTE A DISTANCE
Nous allons commencer cet intéressant article par un aperçu de l'historique de la formation à distance, un bref descriptif de son évolution à travers les différents pays qui s'y sont essayés en référence au contexte qui caractérisait l'histoire des peuples de ces pays.
1. L'ère 1840-1919
Cette période est caractérisée par des grands événements historiques qui ont frappé les peuples du monde parmi lesquels on peut citer la révolution française de 1848 et la proclamation de la République (Louis Napoléon Bonaparte est élu 1er président de la république française avec 75% des voix), la guerre de sécession aux États-Unis (1861-1865) et la première guerre mondiale (1914-1918). La création du timbre-poste et le respect dû à la poste pendant les guerres permettait au courrier d'arriver jusqu'aux combattants. Il était donc possible de transmettre des connaissances.
C'est pourquoi, cette période constitue l'ère des pionniers de l'enseignement par correspondance. On peut d'ailleurs repérer les évolutions suivantes :
- 1840 : création en Angleterre par Isaac PITMAN du premier cours par correspondance au monde ;
- 1856 : Création de l'Institut Toussaint et Langenescheidt à Berlin, institut spécialisé dans l'enseignement des langues par correspondance ;
- 1877 :création par Rose HATTEMER du premier cours par correspondance en France, connu à l'époque sous le nom de Cours HATTEMER ;
- 1881 : Création du cours "Lécole chez soi" par l'éditeur Léon Eyrolles ;
- 1906 : Création du Ministère du Travail en France ;
- 1907 : création de "l'Ecole Universelle" ;
- 1919 : Loi Astier qui permet le développement de l'enseignement technique.
2. L'ère 1920-1940
C'est l'ère de la véritable amorce de l'enseignement à distance qui revêt de plus en plus un caractère multimédia.
Dans la première décennie, l'enseignement par correspondance s'oriente vers le soutien scolaire. Développement du cinéma et premières tentatives pour associer le disque 78T à l'apprentissage des langues. On peut retenir que c'est le 1er mars 1928 qu'on a connu les débuts de l'aéropostale exploitant la liaison France-Amérique du Sud. Puis durant les années 30, on a vu la naissance de plusieurs centres d'orientation et de formation partiellement subventionnées par l’État. Mais le tournant de cette période en matière de formation à distance c'est la création en 1940 en France du Centre National de Télé-Enseignement (CNTE), établissement public sous tutelle de l’Éducation Nationale (1944-1945 : 1413 inscrits). La fin de la guerre a exacerbé les besoins en formation dans tous les domaines de la reconstruction et du développement. Il fallait donc obligatoirement s'orienter vers une restructuration de la formation.
3. L'ère 1944-1969
Durant cette période, il fallait s'organiser pour la formation de la main-d’œuvre, créer des associations qui puissent porter l'espoir des entreprises naissantes.
Entre 1946 et 1947, Il y a eu une réorganisation des grandes associations professionnelles et une définition de la formation professionnelle :
1949 : création de l'Association nationale interprofessionnelle pour la formation rationnelle de la main-d’œuvre, qui devient en 1966 l'AFPA (Association pour la Formation Professionnelle des Adultes).
En 1950 eut lieu le développement du microsillon et du magnétophone.
1963 : Début de télé-CNAM (Centre National des Arts et Métiers)
1965 : Création du Centre National de Promotion Rurale (CNPR) qui lance un enseignement par correspondance dans les zones rurales.
1969 : développement de la télévision scolaire par l'UNESCO dans les pays en voie de développement.
4. L'ère 1970-1994
On peut retenir de cette ère qu'elle est par excellence celle du déclin et de la renaissance de la télévision éducative et de l'essor de l'enseignement à distance au niveau international.
Un bouillonnement institutionnel caractérisait les années 1970 :
- création du Conseil International de l'enseignement à distance,
- création du Consortium International Francophone de Formation à Distance (CIFFAD)
- création de l'Association des Écoles Européennes d'Enseignement par correspondance
- création de l'Association des Universités ouvertes d'Asie
- création de l'Université Nationale d’Éducation à Distance en Espagne
- création de l'Open Université en Grande-Bretagne
- les premières images de télévision apparaissent au Sénégal
En 1974, la dissolution de l'Office de Radio Télévision Française (ORTF), crée une situation de concurrence dans l'audiovisuel et fait passer au second plan les préoccupations de formation et d'éducation par ses médiums.
Le Ministère du Travail créé depuis 1906 va beaucoup contribuer à tracer une ligne de démarcation entre l'enseignement à distance et la formation à distance, les deux ayant toujours tendance à être facilement confondus. Ainsi, il sera petit à petit établi que l'enseignement à distance a pour vocation essentielle de transmettre des savoirs, des connaissances en développant les aptitudes intellectuelles. Tandis que la formation à distance a pour orientation principale d'agir sur les comportements de l'apprenant dans le but de développer en lui des compétences spécifiques orientées selon les besoins des entreprises et des organisations. Et pour cela l'utilisation de l'informatique va être de plus en plus nécessaire. N'oublions pas que jusqu'en 1962, le mot "informatique" était absent du dictionnaire. C'est un certain DREYFUS prénommé Philippe qui l'a forgé pour désigner la science du traitement de l'information par une machine, l'ordinateur.
C'est en 1985 qu'a été lancé en France, le PLAN INFORMATIQUE POUR TOUS. En 1987, a eu lieu l'expérimentation de la télé-vidéothèque scolaire "Éducable" par le CNDP suivie, quelques années après, par l'expérimentation de "Formacâble" destinée à la formation professionnelle.
Décembre 1994 : lancement de la "Cinquième télévision de la connaissance et du savoir".
Dès 1996, Jean Claude MAROT et Anne DANIGE disait que l'enseignement à distance est apparu dans la seconde moitié du XIXème siècle, d'abord grâce à l'émergence des classes moyennes qui, très vite, comprennent la nécessité d’accroître tant leurs connaissances que leurs compétences par l'étude personnelle "tout au long de la vie".
Mais cette volonté seule n'aurait pas engendré le développement de la formation à distance, sans, en parallèle, le développement de la technique : technique d'impression et de reproduction des textes (apparition du stencil), la généralisation des services postaux et plus tard, l'arrivée de l'Internet qui n'a cessé de se développer depuis 1969 avec l'apparition d'ARPANET qui connectait déjà 4 ordinateurs à l'Université de Californie de Los Angeles.
NOUVELLES MÉTHODES D'ENSEIGNEMENT
1. Concept de Formation Ouverte et A Distance (FOAD)
Selon une définition de la Commission Européenne - Initiative E-learning, la FOAD consiste en "l'utilisation des nouvelles technologies du multimédia et de l'Internet afin d'améliorer la qualité de l'éducation et de la formation à travers l'accès à distance à des ressources et des services, ainsi qu'à des collaborations et échanges".
On peut désormais se former à distance, chez soi ou ailleurs, par visioconférence, par le biais de forums et autres chats, par systèmes de messagerie, par l'intermédiaire de sites spécialisés - portails de formation (ou plateformes) - et par bien d'autres possibilités offertes par les progrès des technologies de l'information et de la communication.
Mais il ne s'agit pas seulement de se soucier de la manipulation des savoirs dans un but d'apprentissage, mais aussi de l'épanouissement de la personne, car il ne faut pas oublier que l'enseignement est une vocation morale qui doit aussi développer chez l'apprenant le plaisir d'apprendre et à asseoir pour soi-même les compétences attendues (mission des campus virtuels).
Toutefois il ne faut pas confondre comme les anglo-saxons, formation à distance et enseignement à distance. Car, comme le soutenait le Ministère du Travail français depuis 1906, la formation à distance a pour mission de susciter des comportements qui puissent aboutir chez l'apprenant à un corpus de compétences appelés curricula. Ces compétences, directement utilisables dans les entreprises et organisations, constituent parfois des réponses à des activités professionnelles déjà engagées. Par contre l'enseignement à distance, s'épanche dans la transmission de connaissances tendant au développement des capacités intellectuelles des apprenants dans les différents domaines du savoir et de la connaissance.
2. Éléments d'un dispositif de formation distance
Une étude du Centre Régional d'Innovation et de Transfert de Technologies Provence-Alpes Côte-d'Azur a produit en 2005 un schéma sous forme de carte conceptuelle mettant en évidence les interrelations fonctionnelles et matérielles sur lesquelles repose le fonctionnement d'un système de formation à distance.
Partant des contenus qui peuvent être sous forme de texte (cours ou évaluations), de vidéo, de son, de page web, d'images, cette étude a montré combien est complexe l'univers de formation à distance.
- complexe par la multiplicité des acteurs concernés (il ne s'agit plus d'un face à face enseignant - enseigné);
- complexe par les outils techniques nécessaires à l'artefact utilisé;
- complexe par les méthodes pédagogiques qu'elle convoque;
- complexe par le manque de contact physique entre concepteurs, formateurs, gestionnaires, tuteurs et apprenants;
- complexe par la difficulté à contrer les causes d'abandon;
- complexe tout simplement à cause de la DISTANCE.
De nouvelles méthodes d'enseignement doivent nécessairement être aménagées dans le but d'atténuer, sinon de lever, tous ces éléments de complexité, afin de permettre à l'apprenant d'évoluer en toute sérénité dans un univers qui le porte, l'accompagne, le protège, le forme et l'éduque.
Tout d'abord lorsque l'on veut évoluer dans un système de formation à distance, il faut bien savoir ce que l'on veut. Un projet de formation à distance ne se raisonne pas comme un projet de développement social, rural, etc. C'est du SOFT. Du micro-soft même! Du soft pour gérer de l’intangible (motivation, découragement, incompréhension, in-assimilation, collaboration, etc.).
Les nouvelles méthodes d'enseignement bien sûr font toujours appel aux vertus du présentiel (cours en bonne et due forme, un formateur, des supports de cours, des apprenants). La spécificité principale de ces méthodes est qu'elles font appel à une profonde réflexion sur les applications à apporter aux différents modèles d'apprentissage élaborés par les spécialistes des sciences de l'éducation depuis la seconde moitié du 19ème siècle. Quelque soit le modèle, l'apprenant est sujet à un auto apprentissage certain qui consiste à l'amener à construire ses propres connaissances selon le schéma suivant :
- lire les cours (connaissance)
- participer à des rendez-vous synchrones ou asynchrones pour les partager et élever le niveau taxonomique (apprentissage essai-erreur)
- résoudre des situations problèmes individuellement et collaborativement (compréhension, analyse, synthèse)
- recevoir les feedbacks réparateurs (évaluation)
- réaliser un projet personnel (application)
Selon Edwin Ray GUTHRIE (1886-1959), le mécanisme de l'apprentissage se trouve à l'intérieur de l'individu.
La FOAD va beaucoup intégrer cette réalité mais va surtout évoluer vers des modèles d'apprentissage du type cognitiviste ou néo-cognitiviste par lesquelles l'homme détient en lui-même des stratégie mentales qui lui sont propres (Jérôme BRUNER) pour construire ses propres connaissances.
3. Les modèles d'apprentissage (source, cours UTICEF, promo 2009)
1. Le modèle cognitiviste se décrit à travers trois modèles:
- Le traitement de l'information (Atkinson, Shiffrin, Anderson)
- Le constructivisme (Piaget)
- Le cognitivisme pédagogique (Bruner, Ausubel)
Car il ne faut pas oublier que la FOAD se soucie avant tout de savoir ce qui se passe chez l'apprenant ou qu'est-ce qui doit se passer.
Finalement
APPRENDRE C'EST QUOI ? ENSEIGNER C'EST QUOI ?
Pour le traitement de l'information (filtrage, encodage, traitement)
Apprendre c'est encoder des stimuli pour permettre un transfert dans la mémoire à long terme, autrement dit, ouvrir le processus qui conduit à l'intégration des informations nouvelles en mémoire.
Enseigner c’est susciter ce processus.
Pour le Constructivisme, Jean PIAGET, contrairement aux behavioristes pour lesquels l'individu est modelé par son environnement, considère que l'apprentissage est le résultat d'une interaction entre le sujet et son environnement : assimilation, accommodation (le sujet est transformé par son environnement).
Ainsi
Apprendre c'est construire ses propres connaissances;
Enseigner c'est susciter chez l'apprenant des schèmes opératoires.
Les activités qui peuvent être associées à une approche constructiviste de l’apprentissage sont :
- Confronter l’apprenant à un environnement complexe pour qu’il y recherche les informations pertinentes (SP, glossaire, carte conceptuelle);
- Laisser l’apprenant se tromper et lui donner le temps de comprendre les causes de ses erreurs (feedback, RV synchrones et asynchrones);
- Donner à l’enseignant un rôle de facilitateur d’apprentissage plus que de dispensateur de savoir (rôle des tuteurs).
Le cognitivisme pédagogique (Bruner, Ausubel)
- Apprentissage par découverte (autonomie, apprendre à apprendre)
Pour un tel type d'apprentissage, l'apprenant doit être mis dans les conditions qui lui permettent de récolter et sélectionner des informations, se poser des questions, identifier les variables pertinentes, tester des hypothèse, etc. Ensuite, il doit être guidé en cours d'apprentissage. Ce guidage peut, bien entendu, être assuré par l'enseignant mais aussi, par d'autres apprenants, ou encore par un dispositif informatique. L'important est que s'installe un dialogue étroit grâce auquel l'apprenant sera épaulé dans les difficultés qu'il aura à dépasser pour résoudre le problème qui lui est posé. Bruner utilisera par la suite le terme "étayage" (scaffolding) pour désigner ce soutien apporté à l'élève en cours d'apprentissage.
- Apprentissage par réception
Tout comme Bruner, Ausubel n'est pas contre le constructivisme. Toutefois, il refuse la conception constructiviste selon laquelle un apprentissage en profondeur ne peut être réalisé qu'en confrontant l'élève à des problèmes.
Ainsi, il s'oppose à l'idée qu'un enseignement basé sur la communication d'informations par l'enseignant conduit nécessairement à des apprentissages de faible niveau. Il considère que, pour autant que l'on prenne soin d'intégrer les connaissances nouvelles à celles que l'apprenant maîtrise déjà, cette forme d'enseignement peut être tout aussi efficace que d'autres stratégies telles que par exemple l'enseignement par découverte proposé par Bruner.
Pour défendre cette idée, Ausubel va s'attacher à mettre en évidence les éléments qui vont faciliter chez l'apprenant "l'ancrage" entre ce qu'il connaît déjà et ce qu'il aura à apprendre. Pour réaliser cet ancrage et conduire à ce qu'il appelle un apprentissage significatif, Ausubel propose de recourir à divers éléments qui vont permettre de structurer le matériel d'apprentissage. Parmi ces éléments, Ausubel insiste beaucoup sur le rôle des "structurants antérieurs" (advanced organizers). Il s'agit de courts textes, de schémas ou de graphiques, généralement présentés en début d'apprentissage, qui vont faciliter la mise en relation des éléments qui feront l'objet de l'apprentissage ainsi que le lien avec les éléments déjà maîtrisés disponibles dans la structure cognitive de l'individu. A côté des structurants antérieurs, Ausubel souligne également le rôle d'une autre forme de structurants: les structurants comparatifs (comparative organizers). Ceux-ci ont pour fonction essentielle d'amener l'apprenant à établir des liens entre différentes parties du matériel d'apprentissage proposé en utilisant des tableaux croisés, des graphes en arbre…
Un matériel bien structuré ne suffit pourtant pas à l'apprentissage, il faut aussi que l'apprenant ait le désir, la motivation d'apprendre. C'est ainsi que, lorsqu'on l'observe confronté à un matériel pourtant bien structuré présenté par exemple sur ordinateur, on peut très bien se rendre compte qu'il contourne cette structuration pour réaliser finalement des activités beaucoup moins intéressantes que celles espérées.
Un autre principe important pour l'apprentissage est celui de différentiation progressive. On présente d'abord les idées générales liées au contenu que l'on veut enseigner et l'on établit ensuite des différences plus précises. Par exemple, on définit la classe des insectes comme de petits animaux invertébrés. Par la suite, on les caractérisera plus précisément par le fait qu'ils comportent une tête indépendante du thorax ainsi que six pattes. Ensuite, on définira à l'intérieur de la classe des insectes, des sous-classes… Pour Ausubel, l'efficacité d'une telle approche tient essentiellement au fait que la structure cognitive est elle-même organisée selon un principe hiérarchique basé sur la différentiation progressive.
Selon les principes du cognitivisme pédagogique
Apprendre c’est ajuster les conceptions préalables aux informations reçues
Enseigner c’est susciter le développement de stratégies cognitives.
2. Le néo-cognitivisme (Bruner, Salomon, Vygotsky, Bloom, Pea)
Les chercheurs qui relèvent de cette approche partagent l'idée que l'individu n'est pas la seule source de l'apprentissage.
La connaissance se construit à partir des interactions que nous entretenons avec notre environnement physique, social mais aussi culturel.
Pour ce modèle nous avons aussi 3 approches :
- L'approche socio-constructiviste
- L'approche socio-culturelle
- L'approche "intelligence distribuée"
Apprendre c'est mettre à contribution les différents aspects de l'environnement d'apprentissage.
Enseigner c'est contextualiser le processus d'apprentissage.